Un programme d’ordinateur est-il brevetable ?

On entend souvent « un programme d’ordinateur n’est pas brevetable ! » C’est inexact ! Cette assertion est vraie si on rajoute à la fin « en tant que tel », lire en cela la convention sur le brevet européen – Article 52-2c.

Un programme d’ordinateur est constitué de lignes de code qui sont écrites par un programmeur. Si vous confiez à 100 programmeurs l’écriture d’un programme qui exécute une certaine tache technique, alors vous aurez 100 versions différentes qui répondront toutes aux besoins. L’originalité de chacune des versions est protégée par le droit d’auteur, car chaque programmeur réalise en soi une « œuvre littéraire et artistique », et la personnalité de son auteur transparaît dans chaque version. Le programme d’ordinateur en tant que tel est donc protégé par le droit d’auteur, et il ne peut être copié à l’identique.

Le brevet vise à protéger une solution technique à un problème technique, mais cette solution peut parfaitement être mise en œuvre par un ordinateur et son programme. Le travail réalisé par ces 100 programmeurs peut faire l’objet d’un brevet car il constitue une solution technique, les 100 versions différentes de programme sont alors protégées par ce brevet.

A contrario, un programme peut ne pas être brevetable. En effet, un brevet protège une invention nouvelle, comportant une activité inventive et ayant une application industrielle. Une invention mise en œuvre par un ordinateur et son programme doit respecter ces critères pour être brevetable. Deplus, au-delà de 20 ans, tout brevet tombe dans le domaine public. Un code source conçu 20 ans auparavant, qui est compilé dans un language moderne, concerne les mêmes fonctionnalités. La combinaison de ces fonctionnalités étant bien connue, il est à craindre que le programme mis en œuvre par ordinateur ne puisse faire l’objet d’une protection.

Prenons un exemple : nos ordinateurs ou nos téléphones portables affichent quelquefois de longues listes de noms de fichiers ou de numéros de téléphone. Le programme place un focus sur un élément affiché à l’écran et, en appuyant sur « ENTER », cet élément est ouvert. Pour naviguer dans la liste, l’utilisateur appuie sur une des touches ▲, ►ou ▼,◄. Mais si la liste contient beaucoup d’éléments, le défilement d’un bout à l’autre devient fastidieux.

Pour résoudre ce problème, une solution technique consiste à adapter la vitesse de défilement du focus en fonction du nombre d’éléments de la liste, la vitesse devient plus grande lorsque la liste est longue. L’image à coté illustre cette invention, elle montre trois pages d’écran affichant une liste d’éléments avec un focus défilant.

J’ai écrit et fait déposer cette invention en 2008, le brevet a été délivré en EUROPE en 2009 (EP1929778B), en Chine (CN101273633) en 2010 et aux U.S. (US8,405,683) en 2013.

Qui peut alors dire qu’une invention MISE EN ŒUVRE par un ordinateur n’est pas brevetable ?

La loi française et les directives de l’Office Européen (OEB) que le logiciel mis en œuvre par un ordinateur doit générer un effet technique supplémentaire allant au-delà des interactions « normales » entre le programme et l’ordinateur. Il importe donc de bien rédiger les revendications qui définissent la portée juridique du brevet. Le Conseil en P.I. connaît les formules à utiliser pour éviter de tomber sous le coup des exclusions.