Une invention dont l’inventeur est un ordinateur est-elle brevetable ?
Monsieur Stephen THALER dépose en 2018 deux demandes de brevets européen, respectivement EP 18 275 163 (date de dépôt : 17 Novembre 2018) et EP 18 275 174. La première invention concerne un récipient alimentaire dont la forme de la paroi comporte une composante fractale. Cette forme facilite la manipulation, limite l’écrasement et permet l’emboitement des récipients. L’autre invention a pour but d’attirer l’attention du consommateur, c’est un procédé d’émission d’un signal lumineux dont la couleur et le rythme ont une influence positive sur le cerveau, et notamment le thalamus. La demande de brevet revendique : « an input signal of a lacunar pulse train having characteristics of a pulse frequency of approximately four Hertz and a pulse-train fractal dimension of approximately one-half ».
Selon la demande, un tel signal attire l’attention du consommateur. Ces demandes ont été déposées en désignant la machine DABUS comme inventeur, or DABUS est une intelligence Artificielle (I.A.) c’est-à-dire un ordinateur exécutant un programme complexe capable de simuler certains traits de l’intelligence humaine (tel que le raisonnement, l’apprentissage, …).
Suite au dépôt en Europe, l’Office (l’OEB) rejette la demande de brevet EP 18 275 163 au motif que l’inventeur n’est pas un être humain, c’est un programme d’ordinateur.
Il semble incontestable que ce programme d’ordinateur est à l’origine de l’invention puisque le programmeur n’a introduit dans la machine que les données du problème. La machine a sélectionné statistiquement les meilleures candidats et à élaborer sa solution technique.
Rappelons que le brevet est un contrat social : l’inventeur céde au bout d’un certain temps son invention à toute personne, et consent à publier (au bout de 18 mois) son invention, ce qui permet d’enrichir les connaissances de l’humanité. En compensation, il reçoit le monopole d’exploitation de son invention pendant 20 ans maximum et peut attaquer en contrefaçon tout tiers.
Une machine peut-elle être concernée par ce contrat social ? N’ayant pas de personnalité propre, elle n’a aucun intérêt à défendre. Tout au plus, les redevances de son brevet pourraient être utilisés pour sa maintenance et l’achat de son énergie ! Cette décision de l’OEB s’appuie sur la nature même du système des brevets et de cette relation qui incite un inventeur à faire progresser la technique et à recevoir un monopole d’exploitation en contrepartie. En l’absence de ces éléments, l’OEB a considéré que DABUS ne pouvait être qualifié d’inventeur et en l’absence d’un inventeurt, : pas de brevet. L’OEB considère donc qu’un inventeur doit disposer d’une personnalité juridique, et qu’une I.A. ne peut être propriétaire de sa propre création.
Une question se pose alors : l’inventeur – Monsieur TALER qui a conçu la machine DABUS, peut-il déposer sa machine ? Il semble que non car en l’absence de problème technique spécifique à résoudre, cette machine ne comporte pas d’application industrielle. En effet, si elle n’est pas alimentée par des données qui définit un problème technique, on ne voit pas à quoi cette machine peut servir.
Cette décision de l’OEB fera certainement naître de nombreux débats techniques, sociologiques et … philosophiques.
(début intervention INPI – partie brevet – le 12 Mars 2020 à 1h12’
La loi Pacte a modifié la loi sur les brevets. La mise en place des mesures va s’effectuer en 2020 – 28mn
- Création d’une procédure d’opposition à un brevet, 1h22’
- Examen de l’activité inventive, 1h27
- Création d’une demande provisoire de brevet, 1h12’
- Remaniement du certificat d’utilité. 1h18’37’’ )